La semaine dernière, au restaurant avec une amie et collègue, nous discutions toutes les deux du métier du chien. Elle me fit part d’un projet qui lui tient à cœur…
Elle : « J’aimerais ça que les éducateurs, entraîneurs, comportementalistes… se rencontrent et discutent de ce que c’est un professionnel canin selon eux, mais personne ne veut venir. »
Moi : (rire) « Ils ont peur!»
Elle : « Je sais! Mais ça serait le fun de faire une définition de ce que ça prend pour être un professionnel canin. La personne qui veut apprendre et faire le métier, qu’est-ce qu’elle doit regarder? Tout le monde écrit sur c’est quoi la définition d’un éducateur, d’un entraîneur, d’un comportementaliste, mais personne décrit ce que ça prend pour faire le métier.»
Moi : « Je comprends ton point de vue. Tu choisis pas le métier, c’est le métier qui te choisit. Lire le chien, tu l’as ou tu l’as pas. Mais les gens sont trop centrés sur eux. Ils ont toujours raison et sont les meilleurs. »
Suite à cette rencontre, j’ai décidé de mettre par écrit ce que je crois être les qualités essentielles qu’un professionnel canin devrait avoir. J’aurai fait ma part pour ce projet. Qu’est-ce que ça prend pour devenir professionnel canin? On ne parle pas ici de formations, de diplômes ou d’argent. On désire établir la liste des qualités essentielles que tous professionnels canins devraient avoir.
La fibre entrepreneuriale : Très peu de centres canins ou de clubs auront les moyens financiers d’engager du personnel. La majorité des formations offertes dans les écoles d’obéissance sont le fruit du(des) propriétaire(s)de l’entreprise. Parmi les rares employeurs, certains préféreront engager une personne sans formation afin de la mettre à leur main. La personne qui s’intéresse au métier du chien devrait être entrepreneur dans l’âme.
L’amour du chien : Si on n’aime pas le chien, on devrait choisir un autre métier! Aimer le chien, c’est le comprendre et le respecter pour ce qu’il est, c’est-à-dire un chien. Le chien n’est pas un mini humain, un bébé ou un défouloir.
- Frapper le chien pour se faire obéir, ce n’est pas aimer le chien.
- Abuser de son pouvoir sur le chien, le soumettre à tout prix, ce n’est pas aimer le chien.
- Être impatient et vouloir passer les étapes trop rapidement, ce n’est pas aimer le chien.
- Être gaga devant le chien, ce n’est pas aimer le chien.
- Minoucher, câliner, caresser… en tout temps pour notre simple plaisir, ce n’est pas aimer le chien.
- Foncer sur un chien sans se préoccuper s’il veut être câliné ou pas… parce qu’on le trouve mignon, ce n’est pas aimer le chien.
- Prétendre qu’un chien a surement été battu simplement parce qu’il est craintif ou a manqué de socialisation, ce n’est pas aimer le chien.
Le désir d’aider : Le chien vit dans une famille humaine, souvent dysfonctionnelle. Sans devenir thérapeute ou psychologue, il faut être ouvert et à l’écoute des besoins du client humain, si on veut aider le chien. Aider le chien ne signifie pas d’en faire une machine performante, surtout si son propriétaire ne vise pas cette performance. Aider le chien ne se fait pas uniquement par l’apprentissage de commandements d’obéissance. Aider le chien, ce n’est pas aider son portefeuille. Aider le chien, c’est maximiser son intégration familiale et son équilibre (bien-être) psychologique, émotionnel et physique.
L’humilité : Il faut être assez humble pour connaître et admettre ses limites. Lorsque la mise en application ne fonctionne pas, lorsqu’on patauge ou qu’on ne sait pas qu’elle approche utiliser; il faut savoir référer!!! C’est ce qui manque le plus aux professionnels canins en général…
Le seul expert du chien, c’est le chien. Tant et aussi longtemps que le chien ne sera pas doué de la parole comme l’humain, on ne pourra jamais être sûr de rien. Peu importe l’expert professionnel canin, même avec un diplôme universitaire en main, il ne sait pas tout et il peut se tromper! L’erreur est humaine!
Le désir d’apprendre : La science du chien est en mouvement continuel. Ce qui est considéré comme une vérité aujourd’hui, pourrait se révéler faux demain. Les scientifiques du monde animal (biologistes, behavioristes, éthologues, psychologues, etc) ne sont malheureusement pas tous en accord. Ils étudient le comportement animal, leurs mœurs, leurs coutumes, leurs relations, leur physiologie, les mécanismes d’apprentissage, etc. Les techniques évoluent. Les approches changent. De nouvelles approches ou méthodes sont développées et il faut vouloir en apprendre les bases. Le désir d’apprendre est directement relié au désir d’aider et à l’humilité.
Le sens de l’observation : Il faut savoir lire le chien et son propriétaire. C’est-à-dire qu’il faut voir et comprendre les mimiques, ainsi que tous les signes corporels émis par le chien, sans oublier ceux de son propriétaire! Lire le propriétaire du chien est tout aussi important, car son attitude vous transmettra des informations indispensables qu’un simple questionnaire pourrait omettre.
Il faut réussir à voir et à admettre qu’on peut s’être trompé, quand notre méthode ou technique ne fonctionne pas avec tel ou tel chien. On doit se remettre en question et s’ajuster en conséquence. Il faut être en mesure d’essayer autre chose. Notre approche peut ne pas convenir à ce chien en particulier ou à son propriétaire!
L’esprit d’analyse et de synthèse : Il faut savoir observer, quantifier, noter, répertorier, interpréter. Il faut aussi savoir organiser l’information reçue pour offrir la formation ou le conseil adéquat. Il faut savoir mettre en application ce que l’on a comme information et connaissance afin de pouvoir s’adapter et adapter notre approche ou notre technique.
La formation académique : Tout le monde peut apprendre en lisant un livre, en suivant un cours par correspondance ou dans une classe, en regardant des clips vidéos sur YouTube©, en participant à un séminaire ou à un atelier, en suivant une formation pratique dans une école d’obéissance ou un club canin… Obtenir un diplôme ou un certificat, ne fait pas de soi un expert. Le diplôme ou le certificat démontre uniquement que vous avez atteint le minimum requis, c’est-à-dire la note de passage, pour l’obtenir! Un diplôme ou certificat, c’est simplement avoir abordé un sujet sous différents angles et en avoir compris l’essentiel.
L’expérience de terrain : Certificats et diplômes en main, reste maintenant à mettre le tout en application! C’est là que le bât blesse pour plusieurs professionnels du chien, tant qu Québec qu’en Europe. La mise en application des méthodes et des techniques n’est pas aussi facile qu’on le croit. Il faut savoir s’adapter! Rien n’est uniquement blanc ou noir. Il y a trop de zones grises pour être en mesure de généraliser complètement. Parfois, l’enseignement académique est très mal adaptée à la réalité du métier sur le terrain. La mise en application peut devenir excessivement difficile pour certaines personnes.
Tous les chiens possèdent leur propre personnalité. Il faut donc être en mesure d’adapter une technique ou une méthode à la personnalité du chien et celle de son propriétaire. Cette adaptation est indispensable. Le professionnel canin doit être versatile.
Comme vous le constatez, je ne fais pas l’apologie d’une méthode, d’une technique, d’une approche ou d’un accessoire en particulier. J’exprime simplement qu’un professionnel canin :
- Ne doit pas porter d’œillères
- Doit désirer échanger, communiquer et discuter avec les autres
- Ne doit pas prétendre avoir LA réponse à tout
- Doit toujours être en formation continue
- Doit prôner le respect du chien et du propriétaire
- Doit démontrer une ouverture d’esprit
- Doit s’adapter au cas par cas (versatilité)
- Doit être patient et à l’écoute du chien et de son propriétaire
Une méthode, une approche, un accessoire… ne sont que des éléments insignifiants par rapport au lien positif qu’il faut savoir développer entre le chien et l’humain. Aucun réel professionnel du chien ne devrait utiliser ces éléments pour se prétendre meilleur qu’un compétiteur. Le lien Homme-Chien ne se fera jamais grâce à un accessoire (collier, laisse, harnais, clicker…), ni avec l’apprentissage de commandements usuels. Le lien se développe avec la compréhension et l’empathie réelle qu’un humain peut développer avec son chien.
Se chamailler pour un collier ou une méthode, n’est nullement constructif. Il faut ouvrir les yeux et aimer le chien tel qu’il est depuis des millénaires. Il faut le respecter en tant qu’individu, membre de notre famille humaine.
Publié le 2 octobre 2014 sur johanneparent.over-blog.com
Auteur : Johanne Parent